Grand âge : améliorer la solidarité


Comment améliorer les mécanismes juridiques permettant de favoriser cette solidarité qui ne doit pas rester purement familiale au risque d’en rester éternellement au Code Napoléon ? Elle doit également être nationale dans le cadre de notre république sociale. « La solidarité a éclipsé aisément la fraternité dans les principes fondateurs de la République ». La solidarité est devenue « le seul principe général auquel la Loi réfère aujourd’hui la sécurité sociale : le « principe de solidarité nationale » ». On constate que l’émergence juridique d’un travail non professionnel conduit à des demandes de « formes de reconnaissance juridique qui ne soient pas directement monétaires, mais attributives de droits sociaux ». Nul ne conteste par ailleurs qu’il s’agit de travaux utiles socialement qui peuvent de surcroît engendrer des économies pour les finances sociales. Une piste pourrait être explorée par le biais d’un enrichissement du compte personnel d’activité (CPA). Ce CPA, créé par la Loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, concrétise une idée assez novatrice, même si elle est débattue depuis quelque temps déjà : attacher des droits et des protections aux personnes et non plus à leur emploi ou à leur statut. Il s’agit de tenir compte du fait que les parcours professionnels sont de plus en plus discontinus et notamment que, durant certaines périodes, les personnes peuvent, pour diverses raisons (en premier lieu évidemment le chômage), être éloignées de l’emploi. Parmi les motivations de la mise en place du CPA figure également la volonté de permettre la valorisation d’activités socialement utiles. Trois grands principes soustendent le CPA : l’universalité du compte, qui concerne tous les actifs, quel que soit leur statut, la portabilité des droits et la fongibilité des droits destinée à favoriser la liberté et l’autonomie de chacun dans la définition de son parcours. Des droits nouveaux pourraient venir abonder ce compte, notamment en faveur des plus fragiles ou des plus éloignés de l’emploi, mais aussi en valorisant les engagements citoyens. Ici encore se pose l’incontournable question du financement: par la solidarité nationale, par l’employeur, directement ou de façon mutualisée, par l’individu lui-même ? Un scénario est envisagé dans le rapport de France Stratégie : « un compte personnel d’activité orienté vers l’usage des temps tout au long de la vie, avec une meilleure articulation des différents temps de vie, voire une reconnaissance d’activités non marchandes, et une fongibilité des droits étendue aux utilisations en temps, pour solvabiliser des activités socialement valorisées ». Le CPA offre ainsi des potentialités. Pourquoi ne pas reconnaître dans ce cadre les périodes consacrées par les aidants familiaux et bénévoles à l’accompagnement des personnes dépendantes? Les périodes et les tâches qu’une personne consacre à un proche pourraient être prises en compte pour l’approvisionnement des différents comptes reçus dans le CPA. On pourrait également imaginer que la solidarité familiale soit reconnue, à l’instar de l’engagement citoyen, par la création d’un nouveau compte accueilli dans le CPA qui permettrait par exemple d’accumuler des heures de formation facilitant le retour vers l’emploi. Certes le dispositif mis en place est complexe et il ne sera pas aisé de concevoir techniquement ce nouveau droit et surtout de le financer, mais une telle proposition pourrait être soumise à la concertation interprofessionnelle « sur les dispositifs pouvant être intégrés dans le compte personnel d’activité » prévue par la Loi de 2016.


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